vendredi, mai 29, 2009

"Les Lesbiennes, ces Fleurs du Bien", un essai singulier

Les Baisers : Milan Roman, vous publiez depuis quelques jours un essai, "Les Lesbiennes, ces Fleurs du Bien". Pourquoi un tel titre et pourquoi avoir écrit un tel essai,
puisque vous êtes un homme ?

Milan Roman : En effet, cela mérite quelques éclaircissements. Lorsque j'ai fait mes études scolaires, j'ai, comme tout jeune français, été amené à découvrir les poèmes de Baudelaire, issus de son célèbre recueil, "Les Fleurs du Mal". Ce titre m'a immédiatement paru énigmatique et contradictoire, car je n'ai pas compris le lien entre
l'être des Fleurs et "le Mal". En m'intéressant au livre, à l'histoire de Baudelaire, j'ai découvert qu'il avait décidé dans un premier temps d'appeler ce recueil "Les Lesbiennes" mais qu'il avait reculé face à l'audace et aux menaces politiques. Mais il a maintenu ses poèmes évocateurs de l'amour lesbien. Je dis évocateurs, car ce sont des poèmes ambigües, comme le reste de l'essai, affreusement marqué par le poison chrétien, ainsi que par le point de vue narcissique du mâle. Les femmes y sont tout de même vilipendées. Il y a quelques jours, Lars Von Trier déclarait, à propos de son dernier film, qu'il ne voyait pas pourquoi le Mal ne pourrait pas être associée à la femme, comme s'il ignorait l'histoire chrétienne qui s'est bien chargé de le faire. Dans mon essai, je prends le contre-pied de cette affirmation et de ses présupposés, et il s'agit pour moi de déclarer et de prouver que les lesbiennes sont des femmes absolument "pures".

Les Baisers : Dans cet essai, vous semblez avoir voulu aborder l'ensemble des aspects de l'être et de l'amour lesbien. Vous avez étudié ce sujet pendant des années ?

Milan Roman : Absolument. Les lesbiennes me sont plus que sympathiques depuis longtemps. C'est que mon livre exprime aussi une empathie concernant leur rapport aux mâles, à priori négatif. Je crois que je les comprends, même si je peux me tromper. A mon sens, l'Histoire, jusqu'à "la crise" aujourd'hui, n'est
que l'accumulation des catastrophes voulues et commises par les pires des mâles les plus narcissiques, dont certains étaient à l'évidence de grands malades. Même si cela déplaît, j'ai été obligé de constater que les femmes, dans 95% des situations historiques les plus connues et les plus tragiquement déterminantes
de notre Histoire, n'ont eu aucune participation ni responsabilité, et évidemment, singulièrement les lesbiennes. Aujourd'hui, je confierais volontiers les rênes du pouvoir à de telles femmes, je pense que les peuples seraient infiniment plus protégés, et pourraient aller de l'avant, alors que nous perdons tant d'énergie et de temps
avec des mâles si peu recommandables - ce que prouvent, hélas, leurs actes. Du coup, oui, pendant des années et encore aujourd'hui, je m'intéresse absolument à tout ce qui caractérise l'histoire lesbienne.

Les Baisers : A commencer par Sappho ?

Milan Roman : Bien entendu. C'est qu'il faut mesurer son audace, sa liberté. Les femmes grecques, on le sait, sont, certes, respectées par les mâles, qui les admirent pour leur beauté (celle d'Hélène, celles qu'Ulysse rencontre dans son Odyssée), mais elles sont enfermées dans le gynécée, et ne sont pas citoyennes. Les enfants grecs, garçons ET filles, sont éduqués par les récits homériques, du concentré de mâles et de dieux bodybuildés, même si les Déesses ont une grande influence. Pour une femme grecque, comment substituer au sujet héroïque "transcendantal" des figures de soeurs-amantes pour en faire l'éloge de la Beauté et pour en exprimer le désir amoureux ? Il a falluune profondeur de l'amour qui est allé jusqu'à conquérir cette liberté de parole, inouïe, et tellement réussie, que Platon fait l'éloge de Sappho. Hélas, avec le christianisme, la destruction de ses oeuvres a été quasi totale, comme de tant de penseurs et philosophes grecs (comme Epicure).

Les Baisers : Et à propos de la Grèce antique, vous publiez à la fin de votre ouvrage un texte que vous présentez comme un original grec, à savoir le véritable texte de l'Odyssée, concernant Ulysse et les Sirènes.

Milan Roman : En effet. Dans la version actuelle et mondialisée, Ulysse croise les voix siréniques, mais, là encore, "héros", il sait, par un stratagème, "avoir la jouissance" comme les psychanalystes l'ont expliqué, mais ne pas céder à l'attraction. Je livre ici un document qui établit que Ulysse ne résiste pas à l'appel des Sirènes et plonge. Après, sous l'eau, c'est "la révélation" !

Les Baisers : Dans votre essai, vous consacrez un chapitre aux représentations et aux plaisirs lesbiens. Quelles évolutions avez-vous constaté ?

Milan Roman : Déjà, elles existent et ne sont pas niées, détruites. En Iran, vous le savez, les lesbiennes, comme les gays, peuvent être arrêtées, jugées, condamnées à mort, et exécutées par pendaison, car elles sont, dans leur essence, niées par ce régime de mâles criminels. Mais quoiqu'ils pensent et fassent, fort heureusement, ils ne dirigent pas le monde, et ne peuvent empêcher ces représentations comme ces plaisirs d'exister. On peut dire que notre époque voit, à travers le monde, et évidemment, spécialement dans les pays où les femmes sont libres de leurs choix et où l'expression des citoyens est favorisée, un épanouissement extraordinaire de "représentations", qu'il s'agisse de films, de photos (je n'évoque pas ici les représentations professionnels, pour adultes, mais les photos personnelles, d'amatrices, comme on peut le mesurer sur les réseaux sociaux du genre de Myspace), de textes. Ces représentations portent en elles des traces des véritables plaisirs lesbiens, et celui ou celle qui veut les connaître doit savoir qu'il s'agit d'un "continent" en soi, car ces plaisirs sont très divers et extraordinairement puissants. Les lesbiennes savent aimer et s'aimer, et en effet, je leur ai consacré un chapitre.

Les Baisers : Pour celles et ceux qui voudraient lire votre livre, celui-ci n'est pas disponible en librairie.

Milan Roman : En effet. J'ai perdu beaucoup de temps avec un éditeur absolument pas sérieux, et j'ai préféré opter pour une solution novatrice, semblable à celle que les musiciens peuvent utiliser aujourd'hui pour se passer des majors. Il s'agit d'une publication par la plateforme Lulu. La mise en page du livre a été très travaillée, est professionnelle, et les lectrices et les lecteurs y trouveront des photographies d'Eric Bonzi et de Keiko modèle. Il y aura dans les prochains mois et les années des nouvelles versions du livre, augmentées, avec d'autres photos et de nouveaux documents. Si une lectrice, un lecteur veut avoir un exemplaire dédicacé, il ou elle peut me contacter à cette adresse lesleslelivre arobase yahoo.fr

Mai 2009

Le blog de l'auteur : http://leslesbiennescesfleursdubien.vox.com
Le myspace : http://www.myspace.com/cesfleursdubien
La page du livre : http://www.lulu.com/content/7188853